Lettre de Noël 2005

• samedi, 24. décembre

Chers parents et amis Avent 2005

chers frères et sOEurs,

L’année 2005, nouvelle année donnée par Dieu, a été chez nous tout imprégnée de son extraordinaire jubilé :  : la Maigrauge a fêté les 750 ans de sa fondation. Nous aimerions relire, revivre, redire avec vous les événements qui ont marqué cette année. Lors de nombreuses réunions communautaires nous avions essayé de planifier visites, prière, exposition, action de grâce, ouverture vers l’extérieur… Avec l’aide aussi du Comité de l’Association des Amis de la Maigrauge qui eut l’idée d’une fête des Amis pour le 26 juin.

L’après-midi du 1er janvier 2005, nous nous retrouvions toutes dans la partie la plus ancienne de notre monastère. Père André bénit les pièces rénovées : scriptorium et salle informatique à l’étage, et la salle des fondatrices, prévue pour l’exposition du jubilé. Cette célébration d’ouverture de l’année d’allégresse nous a remplies de joie, de respect aussi envers Richinza et ses compagnes qui, en 1255, ont commencé la vie monastique sur cette terre même, et envers les innombrables sOEurs qui, sans interruption, de génération en génération, ont transmis l’amour pour Dieu jusqu’à nous aujourd’hui.

Comme convenu, le 7 janvier, P. André Letarte, après presque 11 mois chez nous, rentre dans sa communauté de Rougemont au Canada. Avec ce départ, la Maigrauge perd un aumônier dévoué, dynamique, joyeux et ouvert.    

Nous remercions nos frères de l’Abbaye d’Hauterive, les religieux et les prêtres diocésains qui, depuis, sont descendus pour célébrer l’Eucharistie quotidienne avec nous. Et aussi le Père Philippe de la Mission Ouvrière Saints Pierre et Paul (MOPP) qui nous a accompagnées dans la liturgie de la Semaine Sainte jusqu’à Pâques.

Des jubilés plus humbles, mais si fraternels dans la Communauté : le 21 juin, nous fêtions notre SOEur Anne-Marie : ses 95 ans d’âge. Déjà, en début d’année, nous avions marqué ses 75 ans d’entrée au monastère. Seulement le zéro en moins du 750ème ! Mon Dieu, tu m’as instruit dès ma jeunesse, jusqu’à présent j’ai proclamé tes merveilles. Aux jours de la vieillesse et des cheveux blancs, ne m’abandonne pas, ô mon Dieu ; et je dirai aux hommes de ce temps ta puissance, à tous ceux qui viendront, tes exploits (Ps 70, 17-18). Egalement une note d’espérance avec l’entrée de Marlise, la « postulante du jubilé ».

Le Dimanche après Pâques, comme dans toutes les communautés chrétiennes et beaucoup de cOEurs croyants, le nôtre est imprégné de tristesse à la nouvelle de la mort du Pape Jean-Paul II. Qui ne l’a vu lors d’une de ses visites dans presque tous les pays du monde ? Qui ne l’a entendu ? Qui n’a rien lu de lui ? Personne !

Le soir du 15 avril : visite communautaire de l’exposition fraîchement aménagée dans la salle des fondatrices. Merci à Madame Lehnherr, directrice du Musée d’Art et d’Histoire à Fribourg, et à ses techniciens qui l’ont installée. Nous voici dans une proximité presque tangible avec nos devancières que nous tenions ainsi à honorer par l’exposition de ces objets précieux.

Le 18 avril, alors que l’Eglise catholique se sentait orpheline et désirait un nouveau Berger, les Cardinaux étant déjà entrés en conclave, nous avons pu suivre en vidéo l’Eucharistie des funérailles du Pape. Une célébration émouvante qui réunissait tant de personnes d’une diversité surprenante.   A Toi, Dieu, la louange des peuples ; la louange des peuples, unanime ! (Antienne du Psaume 66).  

Le 19, à 18h05, Mère Abbesse sonne la cloche de l’obéissance. En quelques minutes, toutes les sOEurs se regroupent autour de l’unique poste de radio ! « Fumée blanche au Vatican ! ». 18h50 : « Habemus Papam – Joseph Ratzinger – Benoît XVI ! ».Confiantes et reconnaissantes, nous faisons nôtre son souhait : Prions les uns pour les autres, afin que le Seigneur nous porte et pour qu’avec Lui, nous apprenions à nous porter les uns les autres (Benoît XVI).  

Nous venons, chères sOEurs, pour fêter avec vous cet extraordinaire anniversaire !(Mgr Genoud, homélie du 3 juillet). 

C’est ce que disaient aussi les membres du SDC, Service des Contemplatives de Suisse Romande. « Nos supérieures travaillent ensemble, les maîtresses des novices et les jeunes sOEurs suivent des cours bibliques avec Marie-Christine Varone. Nous aussi, le « moyen-âge », nous voulons nous rencontrer ! ». L’après-midi du 20 avril en fut l’occasion. Impressionnante cette assemblée multicolore de 88 sOEurs réunies pour la prière de 14 heures dans notre église. Puis, visite guidée, en groupes, de tout le monastère. Et pour combler cette joie, « goûter- partage » à la Salle Saint Benoît. Un grand merci à nos premières hôtes !

Le deuxième grand acte de notre jubilé fut le 24 avril : les paroissiens de la Basse-Ville de Fribourg, Saint Jean et Saint Maurice, avec leur curé Michel Christinaz, sont des nôtres pour la messe du dimanche, suivie d’une visite guidée. Environ 140 personnes, jeunes et vieux, grands et petits, francophones et alémaniques, se retrouvent chez nous. Dom Mauro d’Hauterive assure l’homélie. Merci au chOEur mixte pour le chant ! Et l’apéritif, après la visite des lieux, est occasion de bons échanges.

C’était en 2005 ! Mais comment donc étaient les contacts entre les habitants de la ville et les sOEurs des premiers temps ? Avant que n’existe le pont de la Motta, avant la rue, les vélos et les voitures ? Le seul accès possible était par la porte du rempart au Sonnenberg ou bien en barque sur la Sarine !

Mère Gertrude avait depuis longtemps un souhait : explorer l’histoire de notre monastère, la mettre par écrit et la publier ! En Madame Núria Delétra-Carreras, licenciée en lettres, histoire de l’art et archéologie, elle trouva l’auteure recherchée pour une telle entreprise. Núria s’engagea totalement pendant plusieurs années dans ce travail, aidée par Mère Abbesse, Mère Marie-Joseph et SOEur Marie-Bernard, et s’appuyant aussi sur des personnes compétentes de l’extérieur. Beaucoup d’entre vous connaissent déjà ce livre merveilleux (en vente dans notre magasin ou en librairie).

Jeudi 19 mai : des prêtres et des membres de toutes les communautés religieuses du Grand-Fribourg vinrent visiter le monastère le plus ancien de la ville, au bord de la Sarine. A l’entrée de l’église, pour la prière de 15 heures, chaque hôte recevait une feuille d’information avec croquis du circuit à visiter et explications sur les lieux accessibles. Les 120 visiteurs purent donc se promener librement dans le cadre délimité. Le goûter dans la salle Saint Benoît permit des rencontres et des échanges joyeux. Oui, il est bon, il est doux pour des frères, des sOEurs, de vivre ensemble et d’être unis (Ps 132, 1), ne fût-ce que pour un après-midi !

Avec les mots mêmes du Président de l’Association des Amis de la Maigrauge, M. Marius Cottier, évoquons ce jour où notre monastère, le livre « L’Abbaye de la Maigrauge, 1255-2005, 750 ans de vie », et l’Association des Amis furent présentés au public : … quelle surprise ce fut pour nous de constater que lors de la conférence de presse le 2 juin, plus de 30 personnes des médias étaient présentes. C’est énorme ! Et pourtant ce n’est pas une catastrophe que nous leur annoncions. Bien au contraire : nous relevions tout simplement cette présence silencieuse de femmes dans l’enceinte de ces murs, donc retirées du monde, et pourtant intensément présentes dans ce monde. De bons articles, de belles photos ont paru dans des journaux et revues d’à peu près toute la Suisse.

De plus, un désir de la communauté allait se réaliser : que M. et Mme « Tout le monde » puissent découvrir la Maigrauge ! Avec l’aide efficace de l’Office du Tourisme et le programme de visites mis au point, nous nous sentions prêtes pour un tel accueil.    

Ainsi, le samedi 11 juin, de 9h. à 11h. et de 14h. à 16h., des groupes de 30 personnes entraient en clôture ; elles étaient 300, dont plusieurs jeunes couples avec leurs tout petits enfants. Vu les nombreuses personnes qui n’avaient pu être accueillies, il faudra répéter le 17 septembre : même programme, mais des groupes de 100 personnes par heure, soit presque 600 visiteurs. Quand la Maigrauge verra-t-elle encore autant de gens contents, étonnés, heureux, enthousiasmés, plongeant dans son atmosphère monastique ? Oui, un jour, une heure dans tes parvis, Seigneur Dieu, en vaut plus que mille autres (Ps 83, 11).

Mais revenons au 26 juin dont on s’approche ! Vous vous êtes inscrits si nombreux qu’il fallut inventer l’après-midi du 18 juin pour une petite centaine d’entre vous. A 14h. avec la communauté, None à l’église. Après la visite des lieux, tout le monde se retrouvait pour un goûter à la placette, cet espace entre les bâtiments conventuels et l’hôtellerie. Occasion d’échanges joyeux et cordiaux entre visiteurs et sOEurs.

Le lundi 20 juin, Père André du Canada nous revient comme aumônier. Joie des retrouvailles, Deo gratias !

L’après-midi du 24 juin, notre Père Abbé Général venait d’arriver et une équipe de TV travaillait au cloître : une certaine agitation règnait dans le monastère. Mère Marie-Joseph, qui pourtant connaît tous les coins et recoins de la Maigrauge, fit une chute en manquant les dernières marches d’un escalier en colimaçon , et se fractura le bras droit.

26 juin : Voici le jour que fit le Seigneur ; qu’il soit pour nous, pour vous, jour de fête et de joie (Ps 117, 24). Les familles des sOEurs et les membres de l’Association des Amis de la Maigrauge en sont les invités. Une Eucharistie d’action de grâce dans l’église bondée, des écrans aménagés dans les bas-côtés. Notre Père Abbé Général préside et fait l’homélie ; magnifiques jeux d’orgue (M.Seydoux), chants mixtes, solo (M. Thierry Dagon), les « Chränzlitöchter » avec les pains d’amitié de Tavel. En effet, cette paroisse s’étendait jusqu’à l’auge maigre où nos fondatrices ont commencé leur vie consacrée à Dieu.    

Nos 400 amis se retrouvent pour l’apéritif au jardin, puis pour le dîner animé de musique et d’allocutions, sous une immense tente dressée dans le pré. Une vraie fête populaire. Louez le Seigneur depuis la terre… tous les jeunes gens et jeunes filles, les vieillards comme les enfants (Ps 148, 7. 12). L’après-midi, tous purent visiter le monastère.

3 juillet 1255 : acte de fondation. 3 juillet 2005 : 750ème anniversaire de la Maigrauge ! Eucharistie inoubliable avec l’évêque du diocèse, Mgr Bernard Genoud, et des hôtes aux responsabilités politiques : le conseiller fédéral, M. Joseph Deiss, les membres du Conseil d’Etat fribourgeois et du Conseil Communal de la Ville de Fribourg, avec leurs conjoints, et d’autres invités du monde politique, économique et ecclésial.  Nombreux étaient aussi les  frères et sOEurs de la famille cistercienne : de Suisse, de France, d’Allemagne, d’Autriche et d’Italie ; mais aussi nos paroissiens habituels. Musique d’orgue (P. Hermann-Joseph) et violon (M. Dominique Stark) soulignent la solennité. Lors de l’apéritif qui suit avec le vin d’honneur offert par l’Etat et la Ville de Fribourg, tous partagent la joie. Et les 95 invités trouvent place dans la salle St Benoît pour le repas de fête. L’après-midi, ils sont conduits à travers le monastère par l’archéologue Gilles Bourgarel.

Cette journée fut une belle concrétisation d’une pensée de l’homélie : …nous ne sommes pas des piquets de vignes plantés les uns à côté des autres, mais des vases communicants, et c’est cela que nous appelons la communion des saints dans notre merveilleux credo… (Mgr Genoud, le 3 juillet).

Le 6 juillet nous arrive SOEur José Kalenga Makenga, ancienne supérieure des SOEurs thérésiennes de Mbujimayi, pour passer une partie de ses vacances. SOEur José nous aide au travail et nous partage avec amour les souffrances et difficultés de la population de son pays.

Les jours de grandes pluies autour du 22 août, où les forces de la nature furent plus fortes que la technique, nous les avons vécus comme beaucoup d’entre vous : impuissantes ! En entendant jour et nuit le bruit de l’eau, en voyant déborder la Sarine en furie, inonder le pré et arracher la passerelle vers le chemin Ritter, notre angoisse grandissait. Au fur et à mesure que nous apprenions les dégâts un peu partout en Suisse, la supplication s’intensifiait. Nous prenions davantage conscience de notre vocation : l’Eglise, notre Diocèse, et cette bonne ville de Fribourg, tous nous avons besoin de vous, chères souurs, qui êtes des passerelles vivantes entre la terre et le ciel (Mgr Genoud, le 3 juillet).

Et le 13 septembre, le « petit train touristique » de la Ville de Fribourg faisait un trajet spécial jusqu’à la Maigrauge. Car ils ne sont venus ni à pieds ni en voiture, les conseillers d’Etat actuels et anciens avec leurs conjoints ! Joyeuse société qui se laissa aussi enthousiasmer par le Couvent aux portes de la ville.

Ne disons pas qu’il n’y a pas de jeunes à l’église ! Le 15 septembre, la nôtre en était remplie. La bonne centaine d’élèves, avec quelques professeures de l’école secondaire de nos sOEurs cisterciennes à Wurmsbach/SG désirait aussi féliciter « la vieille Dame Maigrauge » pour son anniversaire. Nous étions toutes émerveillées de leur intérêt et de leurs questions.

Du 23 au 25 octobre, encore une visite ! « régulière » celle-ci : par Dom Cassien Lauterer, abbé de Mehrerau, et pour la première fois dans l’histoire de la Maigrauge, par une co-visitatrice, Mère Hildegard Brem, abbesse de Mariastern-Gwiggen.

Comment la Maigrauge avait-elle fêté ses 700 ans ? Quatre de nos sOEurs ont vécu ce jubilé. Elles disent qu’en 1955, à cause de la clôture, les visites à l’intérieur n’étaient pas possibles. Mais alors, en 2005, on s’est rattrapé ! Souhaitons que la pensée de notre Abbé Général se confirme dans le cOEur de ces plus de 2.000 visiteurs : Le monastère est aussi Maison de Dieu, c’est-à-dire maison de pierres vivantes capables de porter un fruit qui demeure… des hauts et des bas de l’histoire du monastère seules resteront les semences d’éternité qu’ils contenaient, parce que l’argent, les bâtiments, les livres, tout disparaît, seul reste ce que nous avons semé dans l’âme humaine (Homélie du 26 juin).

Nous avons aussi rencontré, entre autres : Eric de la MOPP, Père Jean-Baptiste, carme, et Áron de Hongrie, lors de leurs premières messes ; les couples responsables des familles Emmanuel de Belgique ; Frère Marie, de Lérins ; Mère Michaela de Steinfeld, devenue abbesse ; Louis de la MOPP qui nous parla de sa vie au Japon ; Père Guy, confrère de notre Père André ; M. Nicolas Michel (à l’ONU), qui nous assura : Si nous pouvons témoigner, c’est grâce à vos prières ; Père Césaire de Prad’mill ; SOEur Blandine du Verbe de Vie qui partagea son vécu des JMJ ; le célèbre architecte tessinois Mario Botta qui nous confia : J’ai besoin de votre prière pour construire de la beauté ; et, pour la fête de Mère Gertrude, Mgr Pierre Bürcher. Notre retraite annuelle a suivi avec le Père Marie-Bernard de Soos, de l’Abbaye d’En Calcat.

Nous ne pouvons oublier ceux et celles qui nous ont quittées cette année : nos cinq sOEurs de l’Abbaye cistercienne d’Eschenbach, dont quatre emportées par la grippe ; les nombreuses victimes du Tsunami et de toutes les catastrophes, le Frère Roger Schutz, nos proches et amis : M. Bernhard Angst, papa de notre SOEur Teresa, Mme Emmy Auerswald-Keller, M. Léon Baechler-Ayer, papa de notre employé Dominique, M. l’Abbé François Butty, Mme Hélène Genoud, M. Paul Giger, Mme Osvalda Lepori, Mme Antoinette Morard, Mme Janine Orban, M. Joseph Rey, M. Louis Schwartz, M. Paul Stark, M. Henri Suard, sans oublier Simon Keshavjee, décédé à 13 ans.

Après tant de salutations, de contacts, de souhaits, d’échanges et aussi de total engagement au travail, nous souhaitons de nouveau approfondir notre vie monastique. Que la semence jetée en terre durant l’année de grâce fasse des racines et porte du fruit, aussi pour notre vie au monastère. Peut-être vous est-il possible d’en suivre l’actualité, grâce au site internet (www.maigrauge.ch) que nous essayons de mettre à jour régulièrement ? Pour information : la messe du jour de Noël, à 11.00 h, sera retransmise en Eurovision depuis chez nous.

Au Président et aux membres du Comité de l’Association des Amis, aux 40 aides bénévoles des grands jours, notre cordial merci !  

La prochaine Assemblée générale de l’Association aura lieu le 18 mars 2006.

Si partout dans le monde de bonnes rencontres avaient lieu comme en 2005 à la petite Maigrauge, alors se vérifierait le verset du Psaume : Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent (Ps 84,11).

Pour l’année 2006, chers parents, amis et connaissances, que se réalise pour nous tous la devise du monastère : DOMINUS PROVIDEBIT - le Seigneur pourvoira.                                                                                                                                   

Vos soeurs de la Maigrauge  

Retour